Je serai vivante

 


Cette voix n'a pas de nom. Elle est celle de toutes les victimes de viol et, dès les premières lignes, elle s'insinue en nous, elle nous lacère au plus profond. Car c'est au cœur de la chair blessée que va se blottir l'autrice Nastasia Rugain pour faire surgir l'horreur, pour la dévoiler à l'autre. A cette oreille anonyme de policier qui tend ses questions pleines de doutes, de suspicion, à celle qui vient porter plainte, seulement trois mois après l'agression. Pourquoi pas tout de suite ? Pourquoi avoir autant attendu ? Pourquoi... alors que les réponses sont aussi évidentes que multiples, aussi souterraines qu'impossibles. Car c'est à l'aube d'un amour réciproque, sous les branches d'un cerisier en fleurs, au sein d'un moment suspendu que le pire arrive et arrache la narratrice à son existence, l'ampute de son insouciance, la broie de l'intérieur. Le texte porte l'écriture au pinacle du scalpel, en ce qu'elle a de plus tranchant. De plus dérangeant aussi. Car les mots, les lignes, les phrases, les pensées s'enchaînent, crues et vraies, font crier la peau, hurler les organes, pleurer les cellules. Mais dans cette parole déchiquetée souffle aussi l'envie désespérée de refaire surface, de revenir à la vie. Alors le titre explose comme une promesse. 


A partir de 15 ans, Je serai vivante, Nastasia Rugani, Collection Scripto, Gallimard éditions, 118 pages, 9 euros. 

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