La sans-visage

Clara était tellement heureuse de retrouver sa meilleure amie, Aïssa, après le déménagement de cette dernière. Des vacances avec elle, pour recommencer comme avant, lorsqu'elles étaient au collège ensemble. Sauf que les choses ont bougé, elles ont changé et Clara ne supporte pas qu'Aïssa puisse rire, parler, s'amuser avec les autres, ceux de cette colo qui sont pourtant - Clara en est convaincue - bêtes comme leurs pieds. La jalousie se cramponne à son coeur, même quand Aïssa vole au secours d'Eléonore que de sales petites pimbêches et des abrutis appellent Babar. Au fil des jours, les sarcasmes, les moqueries, les méchancetés, les coups pleuvent sur la jeune fille. Et Clara y assiste sans réagir. Elle le sait, s'en veut, mais ne fait rien. Jusqu'au jour où Eléonore disparaît et que tout remonte à la surface, la met face à elle-même.

Louise Mey, avec des allers-retours dans le temps, organise les morceaux d'une histoire d'harcèlement comme il y en a tant. Mais se plaçant dans la tête de Clara, elle offre au lecteur le point de vue de celle qui, se taisant, se fait complice, presque malgré elle. La position du plus grand nombre finalement, quand on n'ose pas, quand on ne rit pas ouvertement, mais un peu quand même, des brimades subies par cet autre qui pourrait être soi, mais qui ne l'étant pas détourne les regards. Et le soulagement de n'être pas celle qui subit suffit pour rester silencieux. L'autrice démonte les mécanismes, montre les rouages de ce qui peut conduire au pire, lorsque la haine grandit peu à peu, va trop fort, va trop loin. En remontant la piste de la disparue, Clara va également remonter la piste de son détachement et prendre conscience de ses erreurs de jugements, de son défaut d'action. Un roman qui donne à réfléchir, à réviser son comportement, invite à ne plus laisser faire/laisser passer !

A partir de 12 ans, La sans visage, Louise Mey, Couverture de Lucia Calfapietra, collection Médium, Editions L'Ecole des loisirs, 205 pages, 15 euros.